SwissCreativeLab, les indépendants se serrent les coudes
En face de l’entrée principale de Baselworld, l’imposante tour de l’Hôtel Ramada. Accrochées aux étages supérieurs, une vingtaine de marques jouent la dissidence en matière d’exposition. Carlo E. Naldi en a pris la tête…
Après tout, l’air que l’on respire à Bâle est le même pour tous, il est gratuit. Sauf que pour exposer sereinement dans les immenses halles gérées par le groupe MCH, il faut montrer patte blanche et disposer de reins assez solides pour pouvoir payer son ticket d’entrée. Comprenez que les mètres carrés du palais des expositions ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Alors la résistance s’est organisée et, sous l’impulsion du bouillonnant Carlo Enea Naldi, un Latin domicilié à Zug dont les activités ne marchent pas sur les plate-bandes des marques horlogères, la résistance s’est organisée. Au nez et à la barbe des organisateurs officiels, serait-on tenté d’écrire, tant leur présence fait désormais partie des murs!
Il y a une certaine logique, dans un salon qui reste avant tout une entreprise commerciale, que la notion de rentabilité au mètre carré ne soit pas compatible avec la raison d’état, tout au moins celle de la culture. Autant il est admis que les emplacements dans les halles de Baselworld reflètent la réalité économique du moment, à savoir que les marques les plus riches - souvent celles qui composent la palette d’offres d’un grand groupe - occupent les meilleurs emplacements, les plus chers. Autant il convient de dire que face à l’histoire horlogère avec un grand H, on ne devrait pas forcément fermer la porte aux plus petits, ou mettre dehors les fleurons du passé, fussent-ils momentanément exsangues. Le secteur horloger est comparable, sur un plan culturel et selon un registre artistico-artisanal, à une immense mosaïque. Ainsi, de ce point de vue, le manque d’un ou de plusieurs morceaux de cette immense juxtaposition d’histoires entrepreneuriales, devrait normalement gêner l’appréciation visuelle de l’ensemble, même si les motifs principaux de la toile restent perceptibles à l’oeil.
Six marques indépendantes: (de gauche à droite), Michel Dawalibi (Jämes C. Pellaton), Carlo Enea Naldi (Edelberg), Ludovic Ballouard, independent watchmaker, Luc Pellaton (WATCHe), Bernard Dick (Snyper Genève), Thomas Engeler (Pierre Thomas Genève)
Ainsi, pour donner à ces viennent-ensuite un pignon sur rue, une vitrine la plus accessible possible, tout commence par le geste courageux d’un homme d’affaires domicilié à Zug, Carlo Enea Naldi. Avant même d’être en mesure de savoir si elles seront remplies, l’homme décide de louer de généreuses surfaces à proximité immédiates de Baselworld, la plus grande manifestation horlogère au monde. Et chaque année, de nouvelles enseignes rejoignent ce berceau de résistance, faisant de ce lieu une plate-forme commune qu’il n’est plus possible d’ignorer. Une alternative plus accessible financièrement que la location d’un stand dans les halles voisines du vertigineux palais des exposition.
Armé d’une latinité désarmante qui le rend proche des Romands, d’un entrain et d'une foi à faire se déplacer les montagnes, cet entrepreneur a su prendre un risque. Non seulement pour sa propre marque d'instruments d’écritures, la marque Edelberg qui fleure bon la suissistude et les arts manufacturiers, mais aussi pour la branche horlogère à laquelle il offre, depuis bientôt une décennie, ces expositions parallèles qui permettent à des indépendants comme lui de sortir du lot, voire de prendre leur envol. Car certaines marques horlogères devenues par la suite d’une taille leur permettant d’être locataire de Baselworld, sont d’abord passées par ces lieux hérétiques. Ainsi, la maison Graff dont le stand est désormais un gigantesque écrin de bois et de cristal posé au coeur de la halle 1, la halle la plus demandée, la plus fréquentée, avait d’abord trouvé refuge, à l’heure où elle n’était encore qu’une jeune pousse bercée de promesses et d’espoirs, en ces étages rebelles.
L’exposition SwissCreativeLab est-elle un sous-Baselworld?
SwissCreativeLab est né en 2008, nous en sommes à notre septième année. L’horlogerie n’est pas la seule à être mise en avant, mais aussi toutes les activités créatives liées au savoir-faire suisse. Nous travaillons depuis 20 ans dans le design, la conception et la production de PLV pour l’horlogerie, la distribution d’instruments d’écriture, la réalisation de produits pour le soin et l’entretien. Nous avons aussi un magasin à Zug qui se nomme Style. Il nous est donc apparu nécessaire de créer une structure qui pouvait rassembler et promouvoir les activités créatives indépendantes des domaines qui nous étaient familiers afin d’un retirer un bénéfice commun.
Votre concept est-il exportable ailleurs qu’en Suisse ou à Bâle?
Il plaît beaucoup car il ne véhicule pas seulement les ‘montres’ mais la créativité suisse en général. Notre plateforme commune qui stimule les synergies est donc ouverte à toutes les disciplines créatives. Le fort impact rendu possible par notre nom a suscité un vif intérêt aussi à l’étranger où les contacts se sont développés de manière spontanée. Notre marque Edelberg produit des instruments d’écriture swiss made et des accessoires hi-tech. Elle n’est donc pas une concurrente directe de nos partenaires horlogers. Ainsi avons-nous avons déjà réalisé des expositions, des concept stores, des plateformes de distribution ainsi que de la communication et du marketing communs en Chine, à Macao, à Taiwan, aux USA, dans les pays arabes. Concrètement en 2016, nous serons très certainement en Inde, dans 2 villes de Russie, en Afrique et dans plusieurs pays arabes. En outre, 2 projets importants sont en cours d’évolution pour la Suisse.
Quels sont les résultats déjà obtenus?
Ils se situent au niveau de la création de synergies et de l’ouverture de marchés ainsi que d’une mise en relation avec les médias intéressés par nos domaines d’activité respectifs. Les petites structures disposant de grands potentiels ont besoin de notre savoir-faire et de nos connections. Nous avons généré plusieurs ventes importantes et atteint une toute nouvelle génération de clientèle.
Il semble qu’en 2016, le SwissCreativeLab persiste et signe?
La 7° édition du SwissCreativeLab pendant BaselWorld a eu lieu au Ramada Plaza Hotel de Bâle, c’est désormais une tradition. Nous disposions en 2016 de 500 m2 répartis sur 3 étages, nous avons aussi créé de nouveaux espaces pour des marques venues gonfler nos rangs. En 2015, elles étaient 24 pour un total de 54 partenaires.
Marques exposantes:
Akrivia, Atlantic, Edelberg, Mer-Air-Terre, Naldi, Linde Werdelin, Rudis Sylva, GoS, 4n, Urwerk, LIC Belgique, Marc Newson Hourglass, Tiret World, Luis Franciacorta Winery, Kairos watches, De Pasquale eyeswear, Officina De Giorgio, AP Limited Edition Singapore, A. Favre & Fils, J.C. Pellaton watches